Septembre 1793.
Nous sommes en pleine Terreur. Les « cy-devant nobles » sont considérés comme suspects et doivent montrer de l’attachement envers le mouvement révolutionnaire sous peine de dénonciation… Pourtant, dans la campagne auvergnate, la chasse aux nobles et aux anciens curés réfractaires n’a pas toujours été suivie par les jeunes municipalités. Les comités de surveillance regrettent d’ailleurs la mansuétude avec laquelle les agents municipaux des communes rurales traitent les concitoyens potentiellement suspects. La lettre que nous présentons ici nous en fait la démonstration. Rédigée par le secrétaire municipal de Lamontgie, Berard ‘cadet’, elle s’adresse à un (prétendu) noble de sa commune, le sieur Fonghasse Dupradet, lui indiquant qu’il fait l’objet d’une dénonciation et lui conseillant de rejoindre son domicile clermontois afin de réclamer au plus vite un certificat de civisme et d’éviter ainsi une future arrestation.
Fonghasse ne suivra pas les conseils de l’agent municipal, et, le 12 octobre suivant, sera arrêté et emprisonné à Issoire. Il aura la chance de ne pas être exécuté comme ce fut le cas pour son voisin Raymond Gabriel du Saunier (de Bansat), mais restera détenu pendant une année.
Nous maintenons l’orthographe de l’époque qui n’a rien à envier à celui de nos adolescents, accrochez-vous !
Au Terrail, 7bre. 1793 l’an 2 de la République.
Citoyen,
Je vous soistes le bonjour aincy qua vostre espous, et je vous fait savoir qui nous est parvenue samedy 28 present [28.09.1793, ndlr] un decré de la comvancion national qui a estés afechés a nautre chef lieux qui porte que touts emdividue de touts … douves estre danson domicille, ou cil en est sortie doive sy rentrer a pay destre reportes suspec et destre mis en arestation jusque a la pay, et comme Mailhait il est pas vostre domicille ont vous poret vous rendre en arestation, il faut vous rendre a Clermont au plus tost pour reclames vostre civismes et vous reviendréz après.
Je n’est autre chauze a vous anoncer que vostre bergier a gardés vos mouton ces jour aincy dan les pres et on la fét un desnonciation contre vous.
Je suis avec la fraternites.[Signature de Berard Cadet, secrétaire de commune]